Pour faire de la bonne cuisine il faut aller dans un bon marché. Juste pas très loin de chez nous il y a le marché de Ouakam. Je m’y étais aventuré une fois mais j’étais bien resté en surface. Je n’avais observé que la partie visible de l’iceberg africain qui se terre sur la rue OKM 99. Cette fois nous y retournons avec Margot qui nous donne un cours de cuisine.
Introduction
Cette partie visible brutalise déjà les habitudes trop prudes de nos marchés occidentaux. On commence en souplesse avec des étals de tissus ou linges. Posés à même le sol, les acheteurs font eux-même la recherche des articles sans réellement altérer l’ordre chaotique de la pyramide. Ensuite une demi-douzaine de poulets entravés, posés à même le sol vous dévisagent du bas de toute leur arrogance.
Ablution
Puis viennent des bâtisses en dur. Supposées en dur car les ustensiles en tous genre sont accrochés partout. Il est facile d’imaginer qu’il n’y a pas de stock. C’est là que l’on trouvera des pilons, des marmites, mais aussi des calculatrices, des tongs, des lampes torches des cure-dents et probablement pleins d’autres trésors dont l’utilité été enterrée avec la poussière qui les recouvrent. Si l’on continue le long du trottoir on pourra aussi trouver de nombreuse denrées alimentaires comme des condiments et des poissons. Les poissons sont à l’air libre et dans des sots. Ils semblent frais. Les volées de mouches sont parfois limitées par l’usage d’un martinet en papier.
Perdition
Nous prenons alors la contre-allée. C’est là que ma connaissance de l’endroit s’arrête. Margot demande son chemin en wolof et nous déambulons dans des coursives étroites flanquées de part et d’autres de « boutiques » plus ou moins odorantes. Virage à gauche, à droite et nous voila déjà perdu dans ce dédale. Il n’est pas possible d’avancer à deux de front et les gens ne sont pas du genre à céder le passage. Nous sommes donc très contents d’y être allés pas trop tard et que la densité démographique soit encore supportable. Là encore quelques marchandes de poisson ont des point de vente, mais on sent bien que ce n’est pas le bon endroit.
Optimisation
Enfin une salle plus grande. Le plafond est plus haut, une douzaine de poteaux en béton disputent leur âge et leur couleur a des banderoles Adji et Doli. Ces deux marques de bouillon de cuisine ont probablement sponsorisé l’ouverture du marché il y a plusieurs ères de cela. Un escalier branlant donnant probablement sur rien est aveuglé par des grandes bâches de tissu. Dans cette enceinte, les ruelles formées par les étals sont aussi étroites que les coursives que nous avons quittées. L’espace est entièrement optimisé pour avoir de la place pour vendre. Tant et si bien qu’il y a même un marchand assis sur son propre présentoir pour ne pas gêner le passage. C’est ici que le poisson est le plus à même d’être acheté. Non pas qu’il soit dans des bacs de glace, mais bien moins moucheté. Et il doit bien y avoir du débit car on pourrait s’attendre à une odeur insoutenable vu la quantité d’étals de poisson. Petits, gros, pointus, ronds, sur le ventre, sur les autres, vidés, à la découpe, toute la poiscaille s’est donné rendez-vous ici.
Et c’est une affaire de femmes. En effet la plupart pour ne pas dire tous les poissonniers sont des poissonnières. Et la plupart pour ne pas dire tous les clients sont des clientes.
Transaction
Pour toutes les transactions nous laissons Margot à la barre des négociations. Ainsi il en fut pour le poisson. Un thiof pour 5000CFCA. C’est un prix tout à fait correct d’après elle. Car à Ziguinchor il monte facilement au dessus de 7000CFCA. Elle négocie également tous les ingrédients dont nous avons besoin. Nos pièces disparaissent les unes après les autres en échange d’oignons prédécoupés, de manioc, du tamarin, bissap blanc, un morceau de lambi (ça se prononce « yep » ici), courgette plate, poisson sec quelques cubes maggi, persil, persil chinois etc…
Conclusion
Avant de rentrer il est important aussi d’acheter un ustensile. Notre frêle pilon-et-mortier a rendu l’âme. Brisé en pleine action, le pilon s’est irrémédiablement fendu. Cela fait un moment que nous devions donc en acheter un autre. Et nous savons d’expérience que pour le thieboudiene c’est pratiquement indispensable. Alors Margot continue son rôle de négociatrice trouve tout. Le premier vendeur est largement en dehors du prix du marché. Il est débouté d’un « han han » sec à l’antillaise qui sonne exactement comme maman. C’est sur le retour, à la surface du marché et une fois Céline subtilement embusquée afin de paraitre le moins toubab possible, que Margot arrive à décrocher un prix raisonnable de deu-mil sink’-san. Auquel il faut toujours ajouter un délai de cinq à dix minutes pour trouver la monnaie parce que évidement il ne nous reste que des grosses coupures.
Restauration
Nous ne dévoilerons pas ici l’ensemble de la recette du tiéboudienne (ni son orthographe exacte apparemment), sauf si vous le demandez dans les commentaires. Mais on vous laisse quand même avec une photo.
Bravo de vous être lancés dans cette longue et difficile (et je parle d’expérience 😉 )
Voilà un marché qui aurait plu à Sylvie l’aventurière ! Mais bon on sait aussi qu’avec 2 filles de plus les négociations auraient été encore plus compliquées !! Forcément les touristes américaines ça fait augmenter les prix 😉 (dixit Brenda la correspondante américaine)
Bises à vous 2.